Après Séville, Cadix
Et puis, je poursuis mon voyage vers le sud. Vers d’autres horizons encore. Après Séville, direction Cadix. Vers Cadix. Cette Belle qui créera d’autres souvenirs. D’autres moments. D’autres images. Ces routes espagnoles qui me font vibrer et me rappellent mon enfance. Les routes des vacances. Les routes de la liberté. Celles qui font penser aussi. Celles pendant lesquelles les images défilent. On pense à nos projets. À nos amours passées. Qui ne sont plus, mais dont on est presque un peu nostalgiques. Les images de l’été. De la mer. D’un baiser salé sur la plage dont on rêve. De la passion qui enivre. De notre cœur qui amplifie nos souvenirs. Qui les bonifie. Les embellit. Les intensifie. Qui les sublime, même. Ces routes où notre imagination va plus loin que tout. Où tout est possible. Ces routes qui nous font sentir invincibles. On se dit que quand on rentrera, on fera ça. Puis ça. Qu’on n’aura pas de remords. Ni de regrets. On est plein de projets en tête. Plein de folies. Le soleil nous guide, d’ailleurs. Il nous accompagne. Il illumine nos pensées, si positives. Il leur donne un sens. C’est ici que la vie, d’ailleurs, prend tout son sens. Son sens parce qu’on est entre amis. Que c’est ça l’essentiel et le plus important. Comme ce chemin que l’on emprunte, les amis sont pailletés. Lumineux. Solaires. Ils font partie de ce peu de choses dans la vie que l’on décide sans même y penser. Des choses inouïes. Naturelles. Spontanées. Parce qu’ils surgissent. Parce qu’ils apparaissent. Parce qu’ils se croisent dans une vie, sans savoir qu’ils vont en changer le cours. Ils sont les meilleurs compagnons de folies, de sourires. De rires. De fous rires. De délires fous. Et de tellement plus. Ils font partie de ces choses précieuses qui, si tu en prends soin, resteront pour toujours. Heureuse. J’ai envie de crier « Andalucía, mi amor ». J’ai envie de rire. De chanter sur Cadena 100 les titres espagnols du moment. Shakira. Alejandro Sanz. De lâcher prise, sortir de ce contrôle dont nous sommes tous victimes. On se sent si vivant à l’étranger. Et je me sens si vivante en Espagne.
Un peu de culture
On pense alors à la belle Cadix. À moins que ça ne soit la Belle de Cadix ? Opérette française, elle est créée à Paris en 1945 au Casino Montparnasse. Luis Mariano détient le rôle principal. Nous aussi, on a envie de suivre cette aventure dans le sud de l’Espagne. Maria-Luisa, Marisa comme ils disent ici, est la plus belle des gitanes. La plus jalouse aussi. Cadix inspire, apparemment. Ville d’art et d’histoire, elle nous rappelle La Havane de Cuba. Elle est d’ailleurs surnommée la Habanita. La petite Havane. Cette ville si unique qui m’a envoûtée et dont je prends le temps de parler ici. Comme à Cuba, Cadix est un peu à part de ses voisines andalouses. Elle n’a aucune racine hispano-musulmane. Elle parait un brin fanée. Décatie. Et c’est en ça que réside d’ailleurs tout son charme. Tout en s’imprégnant de son atmosphère nostalgique, on découvre les ruelles de cette ville du bout du monde. Première colonie fondée au-delà des colonnes d’Hercule, elle est à l’époque le bout du monde connu. On flâne alors dans ces rues un peu usées, qui nous amusent. L’ambiance y est si chaleureuse. On s’y sent presque, tiens, au bout du monde.
Cadix que voir ?
On se balade dans le Barrio del Pópulo. Ce plus vieux quartier de la ville est aussi l’âme de Cadix. Artistes et artisans investissent ce dédale de rues et ces lieux de passages. On observe leur travail à la Galería Artesanal El Pópulo. Les places ombragées comme la Plaza de Candelaria nous donnent envie de nous arrêter. De lire un livre. De prendre quelques photos. De créer. On découvre l’Iglesia de Santa Cruz et la Casa de las Cadenas au magnifique portail ouvragé. Pour les amoureux qui auraient à se faire pardonner, pour les amants éperdument amoureux ou pour les amoureux des fleurs (ça marche aussi), on fait un détour vers la Plaza de las Flores pour découvrir son marché aux fleurs. L’odeur nous transporte ici. Au marché central aussi d’ailleurs, plaza de la Libertad. Plus alimentaire celui-ci. On s’imagine déjà à la fin du marché avec du jambon ibérique, un peu de queso espagnol et un verre de vin. En terrasse. Et avec les copains, évidemment.
Ce quartier du Pópulo abrite aussi la cathédrale de Cadix. Celle-ci fut construite à l’époque où le commerce avec les Amériques faisait de la ville une véritable puissance. Et puis, le soir, ce quartier s’anime. La vie s’y active. Spectacles, concerts, bars et pubs nous transportent au cœur d’une atmosphère ardente. Bouillante. Bouillonnante même. On s’arrête déguster quelques tapas chez Malagueño, si traditionnel. Chez Pay-Pay, on découvre quelques artistes, grâce à des petits concerts qui nous transportent. Ceux auxquels on ne s’attendait pas. Cet ancien bordel fréquenté par les marins du port garde son âme authentique. Festive et chaleureuse. C’est le moins que l’on puisse dire.
Dans le Barrio de la Viña, on sent les brises de la page de la Caleta. Unique plage dans la vieille ville de Cadix, elle est bordée d’un cadre pittoresque entre les deux châteaux de l’Espagne (San Sebastian et Santa Catalina). De quoi ne pas acheter un château en Espagne, justement. Puisque tout est possible. Puisqu’en vacances, nous sommes si puissants. Invincibles et forts.
El barrio de la Viña Cadix
Le quartier de la Viña nous envoûte lui aussi. Plus près des habitants de Cadix, les Gaditans, on s’arrête prendre un verre à la Taberna Casa Manteca, qui tient le nom de scène de son fondateur, un ancien torero. Au cœur de l’Espagne, on déguste là aussi des tapas de fromage et de charcuterie, comme le morcón de bellota, avec en fond un air de Flamenco lorsque quelques groupes sont présents. Le long comptoir en bois me rappelle tous ces bars espagnols authentiques. Ceux de mes premières années passées en Espagne. Ceux de mes années étudiantes à Murcia, au Lizarrán, où je mangeais des pinchos au comptoir. Nous passions à la caisse avec nos pics en bois. Ils servaient d’addition : les serveurs les comptaient pour savoir combien nous en avions mangé. Aujourd’hui, ces serveurs, véritables rayons de soleil, comptent encore. Pour moi cette fois. Ils sont devenus mes amis. Ces longs comptoirs en bois me rappellent à quel point ils réunissent. Comme un match de foot, ils sont fédérateurs. Ils permettent les rencontres. Les échanges. C’est ici que tout se passe, bien plus qu’à une table d’ailleurs. C’est un peu le cœur du bar. Et en Espagne, je crois que c’est là que je préfère être pour boire un verre de vin. Toujours au comptoir, au Faro cette fois, calle San Felix, on teste de délicieuses tapas de poissons et de fruits de mer. Mes préférées.
Et puis. Le lendemain. Vient l’heure du petit-déjeuner. Ces lendemains ensoleillés où la ville, plus calme, nous offre encore de belles surprises. Entre amis, on crée un moment privilégié. Le matin resserre aussi les liens. À l’heure du café. L’heure des papotages. L’heure où nous sommes naturels. Vrais. Authentiques. Une heure moins intime, mais si profonde à la fois. On prend notre petit-déjeuner dans le meilleur café de la ville. La Vaca Atada, calle Nueva. Une tostada con tomate y aceite de oliva. Une tartine à la tomate et à l’huile d’olive, avec ou sans jambon. Selon les envies. Les meilleurs petits-déjeuners espagnols. Ceux pour lesquels je pourrais faire la route encore et encore. Chaque jour. Chaque matin. Ceux qui font briller le soleil pour tout le monde, même là où il n’y en a pas.
Un brin romantique, Cadix est une invitation à l’imagination. Comme ces routes infinies. C’est fou, comme le champ de l’imagination est large. Tout part d’ici, en fait. Tout ce qui est imaginé ou rêvé est possible. « Si tu peux le rêver, tu peux le faire », disait Walt Disney. C’est en fait ceux qui rêvent à une idée qui vont le plus loin. Au bout du monde s’ils le veulent. Ce bout du monde là, ou un autre. À condition de s’en donner les moyens. Avec patience. Détermination. Discipline. Courage et persévérance.
Cadix est une invitation à l’amour aussi. Aux folies. Aux amants du soir qui s’offrent une parenthèse enchantée. Le temps s’arrête. Comme tous les soirs d’ailleurs. Les heures ne sont plus. Et la fête prend le dessus. Ce qui se passe à Cadix restera à Cadix. Et c’est bien pour ça qu’on y reviendra encore et encore.
Mais malgré son sourire et son air engageant
La Belle de Cadix ne veut pas d’un amant !
Chi-ca ! Chi-ca ! Chic ! Ay ! Ay ! Ay !
Chi-ca ! Chi-ca ! Chic ! Ay ! Ay ! Ay !
Chi-ca ! Chi-ca ! Chic ! Ay ! Ay ! Ay !
Ne veut pas d’un amant !